1969-
Longueuil et Jacques-Cartier se fusionnent
En 1969, Longueuil est une sympathique petite
ville de 26 500 habitants répartis sur un territoire d'à
peine 2 000 acres. La cité de Jacques-Cartier, quant à
elle, connaît un essor fulgurant depuis sa création, en
1947. C'est l'exemple typique d'une ville-champignon. En 1969, elle
compte 66 820 personnes réparties sur un territoire de 15
000 acres. La cité de Jacques-Cartier possède un parc
industriel près de l'autoroute 20 et son avenir semble très
prometteur.
Depuis 1966, Roland Therrien est à la mairie. Grand Chevalier
des Chevaliers de Colomb de Longueuil, il compte davantage d'amis à
Longueuil qu'à Jacques-Cartier. Il fut d'abord élu comme
conseiller municipal du quartier Bellerive, grâce à une
équipe qui était alors favorable à l'annexion par
Longueuil de ce secteur, en 1961. Longueuil dut cependant plier l'échine
devant la résistance de l'équipe de Léo-Aldéo
Rémillard.
Dans la foulée de la publication des rapports Lemay, de 1966
à 1968, qui préconisèrent une fusion de quelques
municipalités de la Rive-Sud, les maires de Longueuil et de Jacques-Cartier
annoncent, au printemps de 1969, qu'ils en sont venus à une entente
de principe sur la fusion des deux villes. L'opinion publique n'est
pas prête à de tels changements, et l'opposition ne prend
pas de temps à se mettre en branle. L'Association des propriétaires
de Jacques-Cartier, dirigée par Paul-Auguste Briand et celle
de Longueuil, dirigée par Gilles Leduc, s'opposent au projet.
Les raisons sont cependant diamétralement opposées.
Les gens de Jacques-Cartier estiment que leur ville est plus industrialisée,
plus grande et sa population plus nombreuse que celle de Longueuil.
Les sources de revenus sont conséquemment plus élevées
qu'à Longueuil.
Les gens de Longueuil estiment que la dette per capita de Jacques-Cartier
est trop élevée à 792 $ contre 495 $ pour Longueuil.
Il ne faut donc pas faire supporter à Longueuil le poids de cette
dette.
Ces explications, purement administratives et quantifiables, dissimulent
des raisons culturelles et sociales beaucoup plus profondes. Jacques-Cartier
est une ville ouvrière, fière de ses origines et du chemin
parcouru depuis sa création. La population de Longueuil est plus
à l'aise sur le plan financier et plus scolarisée. Il
n'est pas rare de voir la bourgeoisie longueuilloise signaler la mauvaise
réputation de ses voisins. Les frictions et les rivalités
étaient nombreuses entre les deux communautés au cours
des années 1950 et 1960.
Un projet d'une telle envergure aurait dû commander automatiquement
un référendum, ce qu'exige le Parti québécois,
nouvellement créé. Mais les sondages ne sont pas très
favorables, surtout dans le Vieux-Longueuil. Avec l'accord du ministre
des Affaires municipales Robert Lussier, les deux maires procèdent
à la fusion, sans consultation, sous prétexte que les
coûts d'une telle opération seraient trop élevés.
Il ne reste qu'à trouver le nom de la nouvelle ville. Le débat
est très bref. Comme l'avait souhaité Paul Pratt dans
son testament politique, la nouvelle ville conserve le nom de Longueuil
pour des raisons historiques : fondée en 1657, la seigneurie
porta très tôt le nom de Longueuil et engloba, suite à
une expansion, le territoire des deux villes.
Il ne faut pas croire que tout baigne cependant dans l'huile. Qui va
tenir le haut du pavé? La situation est complexe : deux administrations,
des accréditations syndicales différentes, sans oublier
l'ego des personnalités politiques.
Dans cette négociation, l'équipe politique de Longueuil
sort nettement gagnante. Le maire Therrien devient le premier maire,
jusqu'au 1er novembre 1969, soit à peine trois mois;
Marcel Robidas termine le mandat de maire jusqu'aux élections
de novembre 1970. Pour ce qui est des conseillers, seuls ceux qui avaient
manifesté des réserves ou des critiques sur la fusion
sont écartés du nouveau conseil: Paul-Auguste Briand,
de Jacques-Cartier, élu cette année-là dans une
élection complémentaire, et Jean-Paul Renaud, de Longueuil.
Le conseil municipal de la période transitoire, assermenté
le 17 août 1969, est donc composé ainsi : Jacques Bouchard,
Fernand Bouffard, Lorenzo Defoy, Thomas Dubuc, Gilles Gravel, Henri
Joncas, Roger Lachapelle, Léo Lafrance, Jean-Jacques Lemieux
et Roméo Paré.
Quant à la fonction publique, la Cité de Jacques-Cartier
réussit à imposer son directeur général,
Fernand Poiré, alors que la Ville de Longueuil lui impose comme
adjoint et directeur des finances L.-Paul Gagnon, ancien grand manitou
de la gestion municipale de Longueuil. Jean-Guy Curzi, de Longueuil,
occupe le poste de directeur technique et Robert Boiteau, de Jacques-Cartier,
celui de greffier. Au poste de directeur de la police, Paul Charron,
directeur du service de la police de Longueuil de 1956 à 1963
et de Jacques-Cartier de 1963 à 1969, doit se contenter du poste
d'adjoint à Pierre Messier, directeur du poste de Longueuil.
Le 1er octobre, le conseiller Roméo Paré démissionne
de son poste de conseiller et est remplacé par Roger Quézel.
Le 17 octobre suivant, Roger Frappier, directeur du Service des loisirs,
remet également sa démission; il est remplacé,
le 1er janvier suivant, par Serge Robillard. Le conseil municipal
octroie à Jean-Guy Roy le poste de directeur général
du Centre culturel; il engage également Yves Ouimet au poste
de bibliothécaire.
Soulignons que l'Office municipal d'habitation de Longueuil, constituant
une corporation sans but lucratif pour fins d'acquisition, de construction
et d'administration d'immeubles à loyer modique pour les personnes
ayant un faible revenu, reçoit son incorporation le 6 février.
La Commission scolaire de Jacques-Cartier fait construire l'école
Georges-Étienne Cartier, selon les plans de l'architecte Maurice
Archambault. Elle procède aussi à l'ouverture de l'école
Lionel-Groulx. Il faut noter que la fusion des deux villes n'entraîne
pas celle des deux commissions scolaires.
La Ville de Longueuil procède à un jumelage avec la ville
de Whitby, en Ontario.
Le centre diocésain, pavillon administratif du diocèse
de Saint-Jean - Longueuil, s'établit à l'angle du boulevard
Sainte-Foy et de la rue Bourassa. L'édifice est construit par
Poulin et Mercier, selon les plans des architectes Pierre Beauvais et
Camille Lusignan. Suite au décès d'Armand Racicot, curé
de la paroisse de Saint-Pierre-Apôtre, Maurice Laforest devient
le nouveau curé de cette paroisse. Jean-Louis Yelle remplace
Alexandre Beauvais comme curé de la paroisse de Sainte-Louise-de-Marillac.
Il demeure à ce poste jusqu'en 1974. Les soeurs de la congrégation
de l'Adoration Perpétuelle du Sacré-Coeur quittent la
paroisse de Saint-Pierre-Apôtre où elles s'étaient
installées en 1961. On fonde le Carrefour Le Moutier, lieu, à
l'origine, de rencontre des jeunes, situé dans l'édifice
du métro de Longueuil.
Le groupe Mercille construit, selon les plans de l'architecte D. H.
Gorman, le domaine d'Auvergne.
À Boucherville, on inaugure, dans la paroisse de Saint-Louis,
le premier centre communautaire du diocèse, d'allure très
moderne et qui se caractérise par la polyvalence de son utilisation.
On restaure, selon les plans de l'architecte Claude Beaulieu, l'église
Sainte-Famille.
Le Courrier du Sud fait un bond prodigieux en augmentant son
tirage de 26 000 à 60 000 exemplaires. Il dessert les municipalités
qui s'étendent de Boucherville à Brossard.
Décès
Racicot, Armand, curé fondateur
de la paroisse de Saint-Pierre-Apôtre.
Dubuc, Hilaire, conseiller municipal de Longueuil de 1929 à
1937.
Favreau, Lucien, conseiller municipal de Montréal-Sud
de 1942 à 1944.
Forest, Évariste, conseiller municipal de Jacques-Cartier
de 1947 à 1949.
Gareau, Arthur, conseiller municipal de Longueuil de 1923 à
1931 et de 1935 à 1943.
Labonté, Joseph, industriel et fondateur d'une entreprise
de semences, d'engrais et d'insecticides, sur le chemin de Chambly.
Lécuyer, Willie, président fondateur de l'Office
des terrains de jeu de la paroisse de Saint-Pierre-Apôtre.
1970
L'année 1970 promet un certain suspense, à Longueuil,
puisque les premières élections, depuis la fusion, vont
enfin permettre aux citoyens de manifester leur humeur politique. Marcel
Robidas promet de ne pas augmenter les taxes pour les deux premières
années, mais il a de l'opposition.La course se fait à
trois candidats: Marcel Robidas, Georges Darveau et Paul Viau. Malgré
cette division du vote, le maire Robidas remporte assez aisément
son élection. Il s'assure de l'appui de quatre candidats du Parti
civique soit Jean-Jacques Lemieux, Paul-Émile Paquin, Gilles
Gravel et Jacques Bouchard; l'équipe de Georges Darveau fait
élire Guy D'Amours et Paul-Auguste Briand alors que les indépendants
Gilles Leduc et Fernand Bouffard complètent la formation du conseil.
L'élection est dramatique pour le conseiller Thomas Dubuc, qui
fut le seul conseiller à faire partie de tous les conseils municipaux
de l'histoire de la Cité de Jacques-Cartier. Il perd en effet
cette élection à la faveur de Jean-Jacques Lemieux. Il
n'en demeure pas moins, encore aujourd'hui, le conseiller qui conserve
la plus longue longévité politique de l'histoire municipale
de Longueuil, soit 23 ans.
Le 17 juillet, Claude Gauthier remplace Robert Boiteau au poste de greffier
de la Ville. René Corbeil devient l'assistant-greffier.
René Perron devient le troisième curé de la paroisse
de Saint-Pierre-Apôtre. Il occupe ce poste jusqu'en 1980. Le révérend
Bonathan quitte l'église St. Mark après 35 ans de service.
Le 29 octobre, des élections provinciales très émotives
passionnent l'opinion publique. Pour la première fois de l'histoire
politique du Québec, un parti prône fermement la souveraineté
du Québec, tout en préconisant des mesures sociales importantes.
Sur le plan provincial, le Parti québécois récolte
23 % des voix et fait élire 7 députés sur 108.
Sur le plan local, la ville est représentée par les circonscriptions
de Taillon, l'ancien Jacques-Cartier, et de Chambly, le Vieux-Longueuil.
Guy Leduc, du Parti libéral du Québec, remporte les élections
sur Jacques-Yvon Lefebvre, du Parti québécois, par 16
501 votes contre 11 138. Le ministre Pierre Laporte n'a guère
de difficulté à faire mordre la poussière à
son jeune adversaire, l'avocat Pierre Marois, en récoltant 25
641 votes contre 14 368. Cette élection laisse des séquelles.
Frustrés de ne pas obtenir un nombre de sièges équivalant
en pourcentage au nombre de votes exprimés, de jeunes polémistes
fondent une cellule du Front de Libération du Québec qui
séquestre le ministre Laporte; il est ensuite retrouvé
sans vie dans le coffre d'une automobile, près de l'aéroport
de Saint-Hubert. La crise d'octobre 1970 demeure une des rares pages
de notre histoire qui soit teintée de violence politique.
Boucherville devient une des premières villes à être
dotée d'un ciné-parc, près de la route 20, à
la sortie Montarville. Sur le plan politique, le maire Clovis Langlois
est reporté, de justesse, au pouvoir. Le reste du conseil est
composé de conseillers indépendants : Jean-Claude Cuerrier,
Jean-Claude Jodoin, Yves Julien, Lionel Létourneau, Jean-Paul
Provost et Léopold Sénécal.
La Ville de Brossard fait construitre une patinoire intérieure
à l'angle des rues Milan et Rome. Sur le plan politique, toute
l'équipe du maire Léon Gravel est reportée au pouvoir.
À Saint-Lambert, J.A. Lalonde, conseiller municipal depuis 1960,
est porté à la mairie, respectant ainsi le principe de
l'alternance entre un anglophone et un francophone.
À Saint-Hubert, on procède aux travaux de réaménagement
de la jonction des routes 1, ou chemin de Chambly, et 9, aujourd'hui
la 116. Cet échangeur ou "rond point", comme on disait à
l'époque, avait été la source de nombreux accidents
mortels. On amorce aussi la construction du boulevard Cousineau. On
fonde le Club de l'Âge d'or de Saint-Hubert, sous la présidence
de Georges Jutras. L'Association des loisirs de Laflèche, sous
la présidence de Jeannine Roland, fonde le Club de l'Âge
d'or Laflèche.
André Mercier devient curé de la paroisse de Saint-Hubert,
en remplacement de Joseph Beauvais.
Décès
Laporte, Pierre, député
de la circonscription de Chambly, de 1961 à 1970. Minsitre des
Affaires municipales de 1962 à 1966 et ministre du Travail en
1970.
Therrien, Roland, ancien maire de Jacques-Cartier, de 1966 à
1969, et premier maire après la fusion de Longueuil et de Jacques-Cartier.
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