La voie de communication la plus utilisée, en Nouvelle-France, est hors de tout doute le fleuve Saint-Laurent, ce « chemin qui marche ».

Il faut impérativement l'utiliser pour aller à Ville-Marie (Montréal). Il faut aussi que les voyageurs ou coureurs de bois l'empruntent pour aller dans la région des Grands Lacs où il se pratique une importante traite des fourrures.

Le fleuve Saint-Laurent est la voie d'entrée et de sortie du commerce avec les Européens et même avec les Américains qui utilisent également la rivière Richelieu. Les seigneuries de La Prairie de la Magdeleine, de Longueuil et de Boucherville profitent pleinement du circuit fluvial. Comme les rapides de Lachine obligent le portage, la seigneurie de La Prairie de la Magdeleine, qui est à proximité, jouit d’un terminus tout à fait naturel.

Voie rectiligne, d'une moyenne de deux kilomètres de largeur entre Québec et Ville-Marie, le fleuve Saint-Laurent constitue une voie de pénétration exceptionnelle au cœur de l'Amérique. Des cinq Grands Lacs, où il puise sa source d'eau douce, jusqu'au vaste golfe d'eau salée qui constitue son embouchure, le réseau hydrographique du Saint-Laurent s'étend sur 3 300 km. Le fleuve Saint-Laurent possède aussi d'importants affluents comme la rivière Richelieu, en provenance du lac Champlain.


La rivière Saint-Jacques, à l'est de la seigneurie de La Prairie de la Magdeleine, à la limite de Brossard, est la voie de communication intérieure des seigneuries de la rive sud de Montréal. Ces seigneuries ont certes de nombreux ruisseaux mais leur seule véritable utilité est d'activer les moulins à eau. Lors de son voyage de 1611, Champlain décrit ainsi la rivière Saint-Jacques: « Le 7 iour ie fut recognoistre une petite rivière par où vont quelquefois les Sauvages à la guerre, qui se va rendre au sault de la rivière des Hiroquois: elle est fort plaisante, y ayant plus de trois lieues de circuit de prairies et forces terres qui se peuvent labourer. Elle est à une lieue du grand sault, & une lieu & demie de la Place Royale. »

Une seule route est-ouest, sur le bord de l'eau, relie tant bien que mal les seigneuries de La Prairie de la Magdeleine, de Longueuil et de Boucherville. Cette route est bien souvent inondée par les crues printanières: le dégel et la gadoue empêchent souvent tout déplacement. L'hiver, les routes sont généralement enneigées et impraticables. On désigne cette route sous l'appellation de chemin du roi.

Il existe quatre routes majeures, dans l'axe nord-sud, qui pénètrent profondément le territoire: le chemin de Chambly et le chemin de la Côte noire (Tiffin) dans la baronnie de Longueuil et le chemin de la côte de La Pinière (Brossard) dans la seigneurie de La Prairie de la Magdeleine et finalement la route conduisant de La Prairie à Chambly puis à Saint-Jean.

Rue Victoria, à Saint-Lambert.

Rue Victoria, à Saint-Lambert.
Carte postale E.C. Kropp Co. Milwaukee.
Collection Michel Pratt.


Rue Saint-Charles, devant le parc Saint-Jean-Baptiste, à Longueuil.

Rue Saint-Charles, devant le parc Saint-Jean-Baptiste,
à Longueuil.

Carte postale Illustrated Post Card.
Collection Michel Pratt.


Rue Sainte-Famille, près du bord de l’eau, à Boucherville.

Rue Sainte-Famille, près du bord de l’eau, à Boucherville.
Carte postale Pinsonneault.
Collection Michel Pratt.


En 1739, Jean Lanouiller de Boisclerc, grand voyer, fait construire la route qui va relier le fort de Chambly au village de La Prairie. Neuf ans plus tard, il établit une jonction qui, passant par Saint-Luc, se rend jusqu'à Saint-Jean.

Le avait été construit pour relier facilement Ville-Marie au fort de Chambly, nommé Saint-Louis à l'origine, et à la rivière Richelieu. Il est ouvert, en 1665, par Rémy de Courcelle, gouverneur de la Nouvelle-France, mais il s'agit alors plutôt d'un sentier qu'empruntent les militaires. L'authenticité du chemin, à cette époque, ne peut être remise en question; il en est fait mention dans les Relations des Jésuites où on reproduit son tracé. Gédéon de Catalogne affirme, en 1712, que le chemin, commençant près du fleuve, est vraiment construit, en partie, selon les directives du baron de Longueuil. Une carte de Murray, datant de 1762, nous indique un tracé qui s'arrête à mi-chemin de Chambly. Le nom en est attribuable à la municipalité de Chambly, qui emprunta elle-même son nom à Jacques de Chambly, soldat du régiment de Carignan, qui reçut cette seigneurie en 1672. L'entretien du chemin est

Chemin de Chambly, vue vers le fleuve, près de la cocathédrale Saint-Antoine.

Chemin de Chambly, vue vers le fleuve, près de
la cocathédrale Saint-Antoine.
Carte postale Pinsonneault. Collection Michel Pratt.

alors à la charge des censitaires demeurant sur cette route. En 1775, les troupes américaines, en rébellion contre les Britanniques, empruntent ce chemin.

Le débute au bord du fleuve Saint-Laurent et longe l'actuel chemin Tiffin et la rue Saint-Georges, dans la paroisse de Saint-Josaphat, dans la ville de LeMoyne. Les lots les plus au sud, au début du boulevard Grande-Allée, dans Mackayville ou Laflèche, étaient aussi désignés sous l'appellation de « Grande Ligne ». On désigne souvent la partie du chemin Tiffin de « montée de la Côte noire ».

Le correspond à l'avenue Victoria, à Saint-Lambert, et son prolongement correspond à l'actuel boulevard La Pinière, à Brossard.

Dans un axe parallèle au fleuve, signalons la présence du dans la baronnie de Longueuil. À l'origine, ce chemin s'appelait Côte Saint-Charles. Il part du chemin de Chambly et va rejoindre le chemin de la Côte noire, dans les villes de LeMoyne et de Saint-Lambert. Les premières concessions, qui datent de 1709-1710, se situent cependant dans le secteur à l'ouest du chemin Tiffin. Les premiers pionniers disposent généralement de terres de 2 ou 3 arpents par 20. Parmi eux, on retrouve notamment les noms de Pierre Couillard dit Lajeunesse, Charles Fary dit Laliberté, Guillaume Robidoux, Pierre Gervais, Étienne Achim, Joseph Robidoux, François Achim et Charles Marsille. Des actes notariés des années 1720 attribuent à cette région le nom de Prairie ou Lac des Atocats. Cette appellation était fréquente: il existe d'ailleurs, encore aujourd'hui, un Lac des Atocas sur le mont Saint-Bruno. Le 17 novembre 1730, dans un acte notarié de Jean-Baptiste Adhémar intitulé « Concession par Madame de Longueuil à François Patenostre », il est clairement indiqué « à l'endroit nommé le Coteau-Rouge vulgairement appelé la prairie des Attokas ». Le 30 octobre 1739, un acte notarié de Danré de Blanzy fait référence à « une concession de terre de quatre arpents de front sur toute sa profondeur sans aucun desert sur icelle scise et scitue en la Seigneurie de Longueuil a l'endroit nommé le Costeau rouge ». Les concessions du cœur du chemin Coteau-Rouge sont obtenues dans les années 1716-1717, mais il n'est nullement fait mention de cette appellation. D'après un relevé de 1723, les concessionnaires sont, en partant du chemin de Chambly et en se dirigeant vers l'ouest, Louis Divelec dit Quimper, Daniel Gélineau, Nicolas Robidou, Joseph Benoit, Léger Bray, Gervais Mallard dit Laverdure, Antoine Lepage dit St-Antoine, Charles Patenaude fils, Charles Dufaux, Laurent Benoit dit Livernois, Étienne Patenaude et Jacques Dufaux.

La couleur rouge semble donc redevable aux « atocats » et la légende qui attribue cette appellation aux « coats » rouges des soldats anglais ne saurait être fondée puisque les actes notariés en font mention bien avant la conquête anglaise. La signification du coteau semble correspondre, d'après les relevés topographiques de cette région, à une zone légèrement plus élevée que la côte sur le fleuve.

En 1957, le conseiller de Longueuil-Annexe, Lorenzo Defoy, réussit à convaincre la Cité de Jacques-Cartier de modifier le nom du chemin. La rue avait, disait-on, mauvaise réputation. On choisit alors le nom boulevard Sainte-Foy, non sans faire allusion au nom du conseiller Defoy. Aujourd'hui, un district électoral, attenant au boulevard Sainte-Foy, porte ce nom.

Toujours dans la baronnie de Longueuil, le (l'actuel boulevard Roland-Therrien) suit le tracé du ruisseau Saint-Antoine et pénètre profondément dans les terres.

Dans la seigneurie de Boucherville, deux rues traversent les terres: la plus importante est la (rue Montarville) et la seconde est la ou (de Montbrun).

Plusieurs chemins, parallèles au fleuve, traversent une partie importante de la seigneurie d'est en ouest. Entre les deuxième et troisième concessions, le chemin du , est prolongé, dans sa partie est, par le chemin du . Puis, un peu plus au sud, le chemin du est prolongé vers l'est par celui du . Enfin, entre la quatrième et la cinquième concession c'est le chemin du dont le prolongement est assuré à l'est par le chemin du .


Les moyens de transport sont simples: le canot, sauf l'hiver, sur le fleuve Saint-Laurent et la rivière Saint-Jacques. On a aussi recours à des barges, comme en témoigne la volonté de Charles Le Moyne, en 1702, de confier un contrat de charpenterie à Léonard Paillé pour la construction d'un moulin à eau sur deux bateaux plats. L'existence de bateaux faisant la navette entre Montréal et Longueuil date des débuts de la seigneurie. Charles Le Moyne est lui-même propriétaire d'une barque de 25 tonneaux, le Saint-Joseph de Montréal, à la fin des années 1660: Jacques Marchandeau, marchand de Longueuil, en devient le « maître », à la fin des années 1670.

Dès le début des années 1700, la calèche, tirée par un seul cheval, est fort populaire.

L'hiver, que ce soit à La Prairie, à Longueuil ou à Boucherville, on traverse le fleuve dans des carrioles tirées par des chevaux en empruntant les chemins sur la glace.